Source MoneyVox 28/02/2024
Le secteur des paiements est en plein changement d’époque, accéléré par l’usage croissant du smartphone pour payer et être payé. Le grand soir n’est pas pour demain, mais l’année 2024 va être marquée, comme les précédentes, par de nouvelles tendances court-circuitant l’usage de la carte bancaire pour les paiements du quotidien.
Le smartphone, partout et tout le temps
Le phénomène, évidemment, est très variable, selon l’âge ou la catégorie sociale. Il n’empêche : les années 2022 et 2023 ont été marquées par un véritable décollage du paiement mobile sans contact, qui affiche une croissance à 3 chiffres. On ne prophétisera pas (encore) la fin de la carte bancaire plastique, mais rien ne semble en mesure de contrarier cette tendance en 2024.
Qu’est-ce que le smartphone a de plus que la carte pour payer ? Dans l’immédiat, pas grand-chose : la plus-value d’un service comme Apple Pay, qui gagne pourtant en popularité, reste relativement limitée. Tout juste permet-il de s’affranchir du code secret (on y reviendra) et de payer sans contact sans limites de montant.
Mais d’autres « wallets » planchent déjà sur des expériences de paiement beaucoup plus riches. « Avec Apple Pay, on change le geste, mais pas la fonction. Nous voulons passer de la fonction à l’expérience, où le paiement n’est plus qu’un des éléments d’un parcours d’achat enrichi de différentes composantes : fidélité, bons d’achat, tickets de caisse, etc. », explique Christophe Dolique, président de la fintech française Lyf. Exemple : le wallet mobile français propose, dans les restaurants partenaires, de payer en un clic depuis sa table, sans passer à la caisse.
En 2024, le mobile ne servira pas seulement à émettre des paiements, mais aussi à en recevoir. L’heure, en effet, est au smartphone comme terminal de paiement. Depuis novembre dernier, un simple iPhone permet d’accepter des paiements sans contact. C’était déjà le cas des mobiles Android.
Résultat : grâce à cette technologie, baptisée SoftPOS dans le jargon, n’importe quel commerçant, même le plus petit, va pouvoir accepter des paiements sans contact, partout et tout le temps. « Les détaillants chercheront des moyens d’effectuer des transactions partout à l’intérieur des quatre murs de leurs magasins, depuis la cabine d’essayage et les allées jusqu’à la caisse », explique Ingenico, un des géants mondiaux des technologies de paiement, dans une newsletter. « Le point de vente mobile pourrait également être utilisé dans un sens plus large, comme l’acceptation de paiements à l’extérieur, par exemple, pour éviter les files d’attente au drive-in ou pour vendre dans une boutique éphémère lors d’un événement. »
L’essor du « paiement de compte à compte »
La carte bancaire n’est pas qu’un bout de plastique. C’est aussi le sésame permettant d’utiliser un réseau d’acceptation (CB, Visa, ou Mastercard) dont le rôle est notamment de garantir au commerçant qu’il sera bien payé. Cela pose au moins deux problèmes. Le premier : l’accès à ces réseaux n’est pas gratuit, il est même de plus en plus cher et participe donc de l’inflation, puisque les commerçants répercutent son coût sur leurs prix de vente. « Dans le domaine des cartes de paiements, les commerçants sont (…) attentifs aux évolutions des coûts (…) », confirme la fédération Mercatel dans une newsletter.
La réponse à ce problème se nomme virement SEPA instantané. Ou, pour reprendre une expression qui révèle mieux son potentiel, paiement de compte à compte. « Le système actuel est complexe et peu transparent, avec un maximum d’intermédiaires qui prennent chacun une commission. On peut s’en libérer grâce au virement SEPA », confirme Pascal Cotte, directeur général France de Satispay, une app de paiement très populaire en Italie, qui met en relation la banque du client avec la banque du commerçant sans intermédiaires et paye ce dernier grâce à une simple transaction rapide.
Le virement, instantané et irréversible de compte à compte, n’est pas précisément une nouveauté : il existe en Europe depuis 2017, sous l’impulsion des institutions européennes. En France, son développement a toutefois été freiné par le choix des banques de faire payer aux usagers le coût de son développement. Ainsi, un virement instantané coûte encore près d’un euro pièce en moyenne. Mais c’est bientôt fini : d’ici la fin de l’année, l’entrée en vigueur d’un nouveau règlement européen va interdire de faire payer le virement instantané plus cher qu’un virement classique.
Cette évolution à marche forcée vers la gratuité va permettre à de nombreux usages de se développer. Les possibilités du virement instantané, en effet, dépassent largement le seul petit paiement entre pairs, pour lequel il est surtout connu pour l’instant. Il est tout à fait envisageable de l’utiliser pour régler des achats en ligne ou en magasin.