Tendues, les négociations salariales ont achoppé chez BNP Paribas. Explications avec Rémi Gandon, délégué syndical national CFE-CGC et président de la Fédération CFE-CGC des métiers de la Finance et de la Banque.
Pouvez-vous nous présenter la section CFE-CGC BNP Paribas et sa dynamique ?
Nous sommes la première organisation syndicale de l’entreprise (60 000 salariés en France). Lors des élections professionnelles organisées au printemps dernier au niveau de la société anonyme (SA), la CFE-CGC a obtenu une représentativité de 46,78 %, ce qui lui permet de signer à elle seule des accords majoritaires, comme lors de la précédente mandature. Au total, nous disposons de 250 porteurs de mandats (titulaires et suppléants) dans les différentes instances de dialogue social. À titre personnel, je suis délégué syndical national (DSN) depuis 2013. En termes de développement syndical, la courbe continue de monter puisque le solde net demeure positif entre les nouvelles adhésions et le turnover. Tout cela grâce à l’implication quotidienne de l’ensemble de nos militants !
Au terme des récentes négociations annuelles obligatoires (NAO), la CFE-CGC n’a pas signé le texte proposé par la direction. Pour quelle raison ?
Il faut se replacer dans le contexte des deux dernières années. À l’occasion des NAO de 2022 pour l’année 2023, dans un contexte inflationniste déjà élevé, nous avions obtenu une augmentation générale des salaires de 3 % assortie d’une prime de 800 euros. Par la suite, étant donnée la montée en flèche de l’inflation, nous avons sollicité à plusieurs reprises des discussions pour activer une revoyure et agir en faveur du pouvoir d’achat des salariés. Cela a été refusé par la direction. Surviennent alors les NAO en septembre dernier avec la constitution d’une intersyndicale pour demander, a minima, des dispositions équivalentes aux précédentes NAO. La direction a d’emblée rejeté cette revendication, faisant valoir de trop grandes incertitudes conjoncturelles pour 2024 : hausse du niveau de risque pour le secteur bancaire français, résultats attendus en stagnation, etc.
Des mesures unilatérales pas à la hauteur de l’implication des salariés »
Comment avez-vous réagi ?
L’intersyndicale a décidé de suspendre les travaux de dialogue social et d’organiser un mouvement de grève en écho à la grande mobilisation intersyndicale nationale du 13 octobre. Si la direction a ensuite quelque peu réajusté ses propositions, à savoir une augmentation générale de 700 euros à 800 euros en fonction du salaire, et une prime de partage de la valeur de 1 000 euros, ces mesures unilatérales ne sont pas à la hauteur de l’implication des salariés. D’où notre refus de signer le texte. La direction a beau essayé de faire valoir que les salariés bénéficient d’accords d’intéressement et de participation, le compte n’y est clairement pas eu égard au niveau de l’inflation. Cela a généré beaucoup d’indignation et de frustration chez les salariés, et notre décision de ne pas signer a été bien comprise.
Quid désormais des échéances de dialogue social ?
Nous allons reprendre les négociations à compter du 9 novembre, date à laquelle se tiendra, avec la direction générale, une réunion du comité social et économique central (CSEC). L’intersyndicale y prononcera en préambule une déclaration suite à l’épisode des NAO. Pour la suite, nous avons de nombreux dossiers à traiter avec de forts enjeux, parmi lesquels les grilles salariales par classification dont les minimas sont bloqués depuis plus de 10 ans ; le forfait mobilité durable ; la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT) ; le télétravail ; la prévoyance. Le SNB CFE-CGC souhaiterait par ailleurs ouvrir de premières discussions relatives à la semaine de 4 jours.
Accompagner au niveau syndical la profonde transformation des métiers de la banque »
En tant que président de la Fédération CFE-CGC des métiers de la Finance et de la Banque, comment analysez-vous l’évolution d’un secteur dont les effectifs continuent de baisser ?
C’est une tendance de fond enclenchée depuis une dizaine d’années malgré une stabilisation des personnels l’an passé. L’érosion s’explique notamment par l’évolution des usages des clients, moins présents dans les agences, par le développement de tous les outils digitaux dont l’intelligence artificielle (IA), et par le transfert de plusieurs activités bancaires vers d’autres pays pour réduire les coûts. Avec les évolutions réglementaires, tout ceci concourt à une profonde transformation des métiers de la banque, tant pour les acteurs mutualistes que pour les grands groupes cotés.
Au niveau syndical, cela nous oblige à une grande vigilance sur la charge de travail des salariés, sur la dégradation des conditions de travail et sur l’attractivité des emplois. Nous avons une responsabilité importante puisque depuis 2017, la CFE-CGC est la première organisation syndicale au niveau national dans le secteur de la banque, de la finance et du crédit.
Source : Site de la CFE-CGC